Rose Esterson - ILGWU

1933 - 1954
395-397 Ste-Catherine O., Montréal

L’immigration de Rose Esterton à Montréal est due à la perte d’un nombre important de proches durant de violents massacres en Europe de l’Est. Son père, son frère et plusieurs autres ont été assassinés durant les pogroms de Kiev en 1919–1920; son mari est décédé des suites d’une crise cardiaque après avoir été battu par les Bolchéviques durant les quatre années qu’ils ont passées en Pologne. En 1925, Esterson (née Raizel Pekelis), alors âgée de 28 ans, est devenue une employée de l’industrie de la confection à Montréal, ce qui lui a permis de faire vivre sa mère et ses trois filles avec la faible somme d’un dollar par semaine.

Esterson, qui se décrit elle-même comme une « grande combattante », était active dans l’International Ladies’ Garment Workers’ Union (ILGWU), en tant que membre de son Montreal Joint Board. Habile à confronter un patron tout autant qu’un agent de son syndicat, elle s’est taillée une réputation de travailleuse et de manifestante fougueuse. Au moment où elle a été interviewée, Esterson recevait 75$ par mois de son ancien syndicat, l’ILGWU; elle était fière que sa pension indique qu’elle n’avait jamais été une briseuse de grève. Les bureaux de l’ILGWU étaient alors situés rue Sainte-Catherine, à l’ouest de la rue Bleury.

Voici un extrait de ses mémoires publié dans l’ouvrage de Seemah C. Berson,I Have a Story to Tell You (WLU Press, 2010):

«Refusing the boss' charity» - […] les travailleurs avaient l’habitude de trimer dur de sept heures du matin jusqu’à dix heures du soir, et ils étaient payés cinquante sous pour deux robes, le croirez-vous? Une fois, j’ai travaillé pour ce patron qui m’a dit que je pouvais quitter le jour suivant et aller prendre un repas de charité pour vingt-cinq sous. J’ai dit, « Pourquoi devrais-je aller à cet endroit? ». Il m’a répondu, « Mme Esterson, je leur ai fait un don de vingt-cinq dollars, alors vous pouvez aller manger là avec vos enfants ». Je lui ai dit : « Si vous me payiez plus que vingt-cinq sous pour ces deux robes, je n’aurais pas besoin d’aller manger dans cette cuisine populaire. Mais vous faites un don de vingt-cinq dollars et c’est écrit sur le mur : Monsieur Untel et Untel autre ont fait un don de vingt-cinq dollars. Je n’irai pas manger dans cet endroit! » (166)

«Personal time at the factory window» - […] j’avais l’habitude de travailler dans un atelier et on devait arriver à sept heures du matin. Si on arrivait en retard de cinq minutes, le patron retirait quinze minutes de votre salaire, qu’il se gardait pour lui-même. Alors, vous savez ce que je faisais? Vous ne me croirez pas. J’arrivais un peu plus tôt, je me dirigeais vers la fenêtre et je m’asseyais à côté. Quand le patron me demandait : « Pourquoi tu n’es pas allé vers la machine? », je lui répondais, « C’est mon horaire. Quand je vois qu’il est 7h 15, je vais travailler ». (167)

«Not hiding my union book» - […] En 1939, la guerre d’Hitler a éclaté et à l’époque, ils ont commencé à organiser le syndicat. Les filles francophones et les Ukrainiennes avaient peur de se rendre au syndicat. J’amenais les filles aux rencontres et j’empruntais des cartes du syndicat. Quelques jours plus tard, mon patron est sorti de son bureau et il m’a dit : « Quiconque a une carte du syndicat ne peut travailler à ma place! » J’ai ouvert ma bourse – parce que, j’avais fait des dégâts, vous comprenez – alors j’ai ouvert ma bourse et j’ai dit : « Voici, Jack, voici mon livre du syndicat, envoie-moi à la maison. » Il a ri et il est allé dans son bureau. Les filles se sont moquées de moi. J’ai dit : « Ne vous moquez pas de moi. J’ai fait des dégâts et je prends les coups! » Ensuite, nous avons organisé le syndicat et nous avons fait la grève pendant six mois. Six mois! (166–167)

Par Sarah Woolf et Seemah C. Berson. Traduit par Chantal Ringuet.

Links

Liens

I Have a Story to Tell You - Seemah Berson
Shedding Light on the Rag Trade - CBC Digital Archives
Strike! - Jewish Montreal of Yesterday - JPL-A
The Esterson, Gildengers and Miller Roots
The Kheel Center ILGWU Collection

Sources

Berson, Seemah C. (ed.) I Have a Story to Tell You. Waterloo: Wilfrid Laurier University Press, 2010.

*Les images avec l'aimable autorisation de Michael Goldstein, Fédération des travailleurs et travailleuses du Québec, Bibliothèque et archives nationales du Québec, Archives de la Bibliothèque publique juive de Montréal et Musée interactif du Montréal juif.

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